La semaine dernière, l’édition spéciale de cette newsletter a été préparée avec l’aide de NotebookLM, de ChatGPT 5 Pro et de Gemini 2.5 Deep Think. J’ai mis en concurrence ces 3 outils sur l’étude du document source d’OpenAI/Harvard – dont vous trouverez le lien en fin d’article. Au final, ces trois outils m’ont permis de récupérer les éléments, de les ordonner, et de challenger les idées et interprétations que j’en avais.
Pour la rédaction globale – hors les quelques lignes de l’édito ci-dessus, j’ai utilisé ChatGPT-5 (aiguillage automatique) comme partenaire de reformulation et de mise en forme.

L’image d’illustration ci-dessous a été générée par ChatGPT
Le 30 novembre 2022, ChatGPT faisait son entrée dans le grand public. Trois ans plus tard, le chatbot d’OpenAI est devenu un outil du quotidien pour des centaines de millions de personnes. À l’été 2025, 700 millions d’utilisateurs actifs chaque semaine échangeaient environ 18 milliards de messages avec cette IA conversationnelle, soit près de 29 000 par seconde. C’est une diffusion d’une rapidité inédite dans l’histoire des technologies grand public. Mais à quoi sert vraiment cette IA conversationnelle qu’est ChatGPT ? Et qui l’utilise ?
Une étude menée par des chercheurs d’OpenAI et de Havard, encore en cours d’analyse mais dont les premiers résultats ont été publiés en début de semaine par le NBER, apporte pour la première fois des réponses chiffrées, basées non pas sur des sondages mais sur l’analyse anonymisée de plus d’un million de vraies conversations dans ChatGPT.
Les premiers résultats bousculent certaines idées reçues – dont les miennes :
- c’est désormais l’usage personnel, avec plus de 70%, quipèse le plus lourd que l’usage professionnel dans ChatGPT
- au travail ChatGPT sert d’abord d’aide à la rédactionet de copilote : “l’écriture- la rédaction” pèse environ 40 % des messages “pro”
- l’étude met en évidencela part de plus en plus importante des femmes comme utilisatrices de cet outil
- les utilisateurs dans leur ensemble ont tendance à donner de meilleures évaluationsdes réponses qu’ils obtiennent lorsque l’outil est sollicité pour éclairer une décision plutôt que pour produire un document fini.
Comment cette étude a été faite
- Un échantillon assez massif et anonymisé : les chercheurs ont analysé environ 1,1 million de messages envoyés à ChatGPT entre mai 2024 et juin 2025 par des comptes grand public (Free, Plus, Pro).
- Aucun humain n’a lu les conversations brutes : avant toute analyse, les messages ont été passés dans un filtre automatique qui supprimait les données personnelles (noms, adresses, identifiants…).
- Des classifieurs automatiques, les contenus ont ensuite été classés par d’autres modèles selon plusieurs axes :
- Usage pro ou perso
- Thème (écriture, infos, conseils pratiques, etc.)
- Intention (Asking, Doing, Expressing)
- Type d’activité professionnelle (via la taxonomie officielle O*NET)
Qui utilise ChatGPT et pour quels usages ?
Genre
Au départ, ChatGPT était massivement masculin avec 80 % des utilisateurs actifs qui portaient un prénom typiquement masculin. Mais la tendance s’est renversée : en juin 2025, on observe une légère majorité féminine.
A noter que côté usages, les femmes recourent un peu plus à l’écriture et aux guides pratiques, les hommes davantage à l’aide technique, la recherche d’infos et le multimédia.
Âge
46 % des messages sont écrits par les 18–25 ans.
Éducation et métiers
Plus le niveau d’éducation est élevé, plus l’usage professionn
el est courant : 37 % des messages sont pro chez les non-diplômés, 48 % avec un diplôme supérieur.
Par métier :
- Informatique : 57 % de messages pro, dont 37 % en aide technique.
- Management/Business : 50 % pro, avec l’écriture en tête.
- Autres professions (droit, santé, éducation) : l’écriture reste dominante autour de 49 % des usages.
ChatGPT est devenu un outil de masse
La courbe d’adoption parle d’elle-même. Après avoir dépassé le cap des 100 millions d’utilisateurs connectés par semaine en un an, ChatGPT atteint aujourd’hui près de 10 % de la population adulte mondiale avec 700 millions d’utilisateurs hebdomadaire.
Source : https://www.nber.org/papers/w34255
L’intensité d’usage suit la même trajectoire : entre juillet 2024 et juillet 2025, le volume quotidien de messages a été multiplié par plus de cinq. Contrairement à beaucou
p d’applications, de services ou de plateformes, l’utilisation ne décline pas après la découverte initiale : chaque cohorte d’utilisateurs a tendance à revenir et à élargir ses usages au fil des mois.
Source : https://www.nber.org/papers/w34255
Le grand basculement : l’usage hors-travail
Si l’on s’attendait à voir ChatGPT surtout utilisé comme un outil de productivité, les données racontent une autre histoire. En juin 2024, 53 % des messages n’étaient pas liés au travail. Un an plus tard, la part hors-travail atteint 73 %. En valeur absolue, cela représente près de 1,9 milliard de messages personnels par jour, contre 716 millions liés au travail.
Ce basculement ne vient pas seulement de nouveaux publics : dans chaque cohorte, les usages non professionnels augmentent au fil du temps. En clair, plus on utilise ChatGPT, plus on l’emmène dans son quotidien personnel : pour apprendre, organiser, comparer, réfléchir ou simplement chercher un coup de main pratique.
Trois grandes catégories d’usages dominent
L’étude classe les conversations par thèmes. Trois catégories totalisent près de 80 %des messages :
Source : https://www.nber.org/papers/w34255
- Les conseils pratiques de la vie courante et personnelle – Practical Guidance : conseils personnalisés, tutorat, “how-to”, idées créatives, santé, sport. Stable autour de 29 % des échanges. En regardant plus en détails, la part de l’éducation est assez importante et loin d’être marginale : 10 % des messages concernent du tutorat ou de l’enseignement, et près de 9 % relèvent de demandes de type “how-to”.
- La recherche d’information – Seeking Information : actualités, produits, recettes, faits divers. En hausse rapide : 14 % → 24 % en un an. ChatGPT sert d’alternative aux moteurs de recherche traditionnels. La différence ? La capacité de l’outil à fournir des réponses personnalisées et à permettre des questions de suivi, transformant la recherche en conversation. La recherche sur Internet devient conversationnelle, et Google l’a compris aussi.
- L’écriture/édition – Writing : rédaction d’emails, notes, traductions, corrections. En baisse relative de 36 % en 2024 à 24 % en 2025. Là aussi il faut regarder les détails : deux tiers des demandes concernent la modification de textes existants (édition, critique, traduction) plutôt que la création pure. Dans le monde travail, cette proportion grimpe à 40% de tous les usages professionnels, soulignant le rôle important qu’a pris ChatGPT comme assistant d’écriture plutôt que comme rédacteur autonome.
Le graphique ci-dessous montre l’évolution des usages au cours de la dernière année. On peut voir la hausse très significative de la recherche d’informations avec ChatGPT depuis 2024. On note aussi la baisse continue de la production de contenus textuels, marquant bien le changement d’usage en cours avec un passage vers des usages de types conseils personnels et pratiques. Enfin, la forme de la courbe des usages multimédia est due à la sortie de la fonctionnalité de génération d’images dans ChatGPT, un engouement “Ghibli”, et une retombée rapide de cet usage.
Source : https://www.nber.org/papers/w34255
Contrairement aux perceptions courantes, certains usages restent marginaux. La programmation ne représente que 4,2% des messages sur ChatGPT, contre 33% sur Claude selon une étude comparative. Cette différence suggère une spécialisation des plateformes selon les communautés d’utilisateurs. Il est certain que Claude domine largement ce secteur et ces usages.
Plus surprenant, mais pas vraiment en fait : l’usage « thérapeutique » ou de compagnonnage reste anecdotique. Moins de 2% des messages concernent les réflexions personnelles et relationnelles, et seulement 0,4% les jeux de rôle. Ces chiffres contredisent l’image parfois véhiculée d’une IA servant massivement d’exutoire émotionnel ou de compagnon virtuel. Là aussi il faut nuancer : la plupart des études sur le sujet des IA compagnons ne mentionnent que très peu ChatGPT. Ces études portent plus souvent sur les usages d’outils comme Character(.)AI, toutes les applications de type “GirlFriend AI” ou encore l’utilisation de Snap AI ou de Meta AI directement dans les applications des deux groupes. Cet usage en mode “compagnon” est largement rependu et majoritaire sur ces plateformes. De plus, il ne faut pas oublier que la censure de certaines thématiques est plus importante sur ChatGPT que sur d’autres plateformes – même si cette censure a été revue et assouplie au printemps dernier.
Demander conseil plutôt que déléguer
L’étude introduit une distinction entre trois types d’intentions exprimées par les utilisateurs :
- « Asking » : demander des informations pour décider
- « Doing » : faire produire quelque chose
- « Expressing » : s’exprimer sans but précis.
Dans l’ensemble, 49% des messages relèvent du « Asking », 40% du « Doing », et 11% du « Expressing ». Ce qui est logique avec tous les usages relevés plus.
Cette répartition s’inverse quand ChatGPT est utilisé comme partenaire au travail, où 56% des messages visent à produire quelque chose de concret.
La qualité perçue : bien poser la question compte
Cette distinction entre Asking, Doing et Expressing éclaire aussi la manière dont les utilisateurs perçoivent la qualité de leurs interactions. Les chercheurs ont en effet montré que toutes les requêtes ne suscitent pas le même niveau de satisfaction.
Globalement, les messages classés Asking reçoivent de meilleures évaluations que les Doing ou les Expressing : autrement dit, ChatGPT est jugé plus pertinent lorsqu’il aide à comprendre, analyser ou décider, que lorsqu’il doit simplement produire un livrable.
Les échanges liés à l’aide à l’expression personnelle (Self-Expression) sont de loin les mieux évalués, avec un ratio supérieur à 7 messages positifs pour 1 négatif. Viennent ensuite les requêtes pratiques et la recherche d’informations, qui obtiennent également des retours très favorables.
En revanche, les interactions de type multimédia (par exemple génération ou analyse d’images) et aide technique (programmation, calculs, débogage) apparaissent plus délicates : elles restent utiles, mais avec des scores de satisfaction plus modestes (autour de 1,7 et 2,7 respectivement).
La qualité perçue dépend moins de la technologie brute que de la façon dont l’utilisateur initie sa demande : poser une question claire pour obtenir un éclairage ou un conseil maximise les bénéfices, alors qu’attendre un résultat “clé en main” expose davantage à la déception. Tout cela suggère que la valeur principale de ChatGPT réside moins dans l’automatisation de tâches que dans l’aide à la décision.
Au travail : ChatGPT, d’abord un “scribe” mais aussi un copilote
Quand il est utilisé pour le travail, ChatGPT se concentre sur les fonctions de rédaction. En juillet 2025, 40 % des messages professionnels concernaient l’écriture – emails, résumés, traductions, notes de réunion – loin devant les autres thèmes.
Il faut souligner que dans deux cas sur trois, l’IA ne crée pas de zéro mais améliore un texte fourni : réécriture, correction, synthèse.
L’aide technique (programmation, maths, data) a décliné dans le temps, passant de 18 % des messages pro en 2024 à 10 % environ en 2025.
Un copilote pour l’information et la décision au travail
Pour aller plus loin, les chercheurs ont mappé les conversations sur la taxonomie de tâches du Département du travail américain. La quasi-totalité des messages liés au travail se concentre sur deux grands ensembles :
- obtenir, documenter, interpréter l’information
- décider, conseiller, résoudre, créer
Ces deux familles représentent à elles seules 81 % des messages pro. L’IA apparaît donc surtout comme un partenaire : elle ne fait pas tout à la place, mais aide à cadrer, analyser et décider plus vite.
Cette uniformité suggère que ChatGPT apporte avant tout un support décisionnel, particulièrement précieux dans les métiers intensifs en connaissances où la qualité des décisions détermine la productivité. L’IA ne remplace pas le jugement humain mais l’enrichit en facilitant l’accès à l’information et en structurant la réflexion.
Zeitgeist
L’image qui se dégage de ces analyses est assez nette : ChatGPT s’impose d’abord comme un conseiller et une aide à la rédaction.
Dans la sphère personnelle, il accompagne les gestes ordinaires de la vie quotidienne comme apprendre, planifier, comparer, organiser. Tandis qu’au travail, il soutient les tâches principales de l’économie du savoir : écrire avec clarté et décider avec plus de discernement. ChatGPT agit avant tout comme un copilote et un partenaire. Il éclaire les choix, fluidifie la production écrite et s’insère discrètement dans les routines individuelles comme professionnelles.
Parce que l’usage personnel croît plus vite encore que l’usage au travail, une partie essentielle des bénéfices actuels se joue dans la sphère domestique : en termes de gain de confort, de temps et de bien-être.
Trois ans après son lancement, ChatGPT n’est donc plus seulement un outil de productivité : il est en train de devenir un partenaire universel d’écriture et de décision, massivement adopté par les jeunes générations et de plus en plus investi par les femmes. L’impact macroéconomique complet reste à mesurer, mais une certitude s’impose déjà : l’IA générative dans son ensemble transforme à grande vitesse nos façons d’apprendre, de rédiger, de décider et plus globalement d’accéder à l’Information et au Savoir.
Texte rédigé avec le support de l’IA